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Histoire de l'Afrique sahélienne. Ce site est animé par un pool de chercheurs historiens africains qui y publient une partie de leurs recherches.

Histoire des Kamissoko

L’histoire africaine est reconstituée à partir de la tradition orale. Or, il existe plusieurs versions pour chaque récit. En absence de preuves de supériorité, aucune version ne peut dominer sur l’autre. Echangeons donc de versions pour enrichir notre histoire et connaitre la différence de version pour notre propre analyse. Evitons donc de mépriser la version de l’autre.

Les Kamissoko, qui auraient quitté le Sahel lors de la première et très ancienne sécheresse qui provoqua la première diaspora, ont occupé successivement : Tona, Tarakouma, Kaya, Nanéko, Balaninko, Fouyan, Dyondyougouré, Dyombané, Fanifasimbo, Fanifa Marinyouman, Banankoro, Somabogoriman, Koroninfle et Krina. Contrairement à d’autres groupes de migrants ils ne sont jamais retournés vers le Nord. Il y a actuellement des membres de cette famille portant la devise Déréba, dans la région de Ségou.

Une première documentation a été recueillie sur le culte de « l’oiseau » kɔnɔ de Krina dont sont responsables les Kamisoko et qui est considéré, nous l’avons vu, comme le « jumeau de bɛmba » ; de nouvelles recherches ont été entreprises sur le sanctuaire de Kangaba, kamã blõ, et sa réfection septennale. Ces informations, qui font l’objet d’un article en préparation, complètent les enquêtes consignées dans nos publications antérieures.

Ce premier aperçu sur certains cultes soninké du Mandé ne permet pas actuellement de dégager le lien qui serait susceptible de les unir. Il se peut que chacun d’eux, associé à une famille, s’insère encore actuellement, à un certain niveau, dans un ensemble cohérent propre à l’ethnie, ensemble dont il conviendra de dégager les structures sociales et religieuses. Mais il conviendra également d’examiner l’histoire, la diffusion de ces cultes après la diaspora, leur implantation actuelle, puis de dégager les influences subies par le contact avec d’autres groupes ethniques comme avec l’islamisme et les modifications qui en ont résulté.

En effet, au cours de cette enquête, nous avons également recueilli des informations sur les migrations des Soninké postérieures à leur installation dans le Mandé, et le peuplement de diverses régions d’Afrique Occidentale, informations qui confirment et complètent celles qui ont été publiées dans divers articles traitant de ce sujet8.

Nous donnons ci-après celles qui concernent l’occupation des falaises de Bandiagara.

On sait que lorsqu’un groupe émigre, il transporte souvent avec lui une portion de la terre d’origine9. Il donne parfois aussi au lieu où il s’installe le nom de l’agglomération d’où il vient ; un lieu de culte ou un autel peut également porter ce nom. Un patronyme ou un toponyme est donc parfois révélateur de l’origine des occupants.

Wéréwéré Suleymane Konaté n’a pas voulu se convertir à l’islamisme à l’époque où Soundiata accédait au pouvoir. Ce dernier l’avait envoyé au Sénégal acheter des chevaux. Après son retour, il a quitté le Mandé avec sa famille, ses biens, ses autels et ses « secrets », gundo ou gyindo. Il a dirigé l’exode, et ses descendants se sont fixés dans les falaises de Bandiagara. Gyindo est le terme malinké ancien pour « secret, mystère, connaissance secrète » ; or, c’est la devise que portent encore actuellement tous les Dogon. Les gyindo sont des Masaré, car le fondateur était le demi-frère de Soundiata. Il était géomancien, possédait un « bâton » (gerene) utilisé pour la divination, questionnait l’oryctérope et le renard. Le procédé est dit timba kinye, « sable de l’oryctérope ». Aujourd’hui encore, quelques géomanciens très compétents, mais peu nombreux, pratiquent ce genre de divination (par le renard ou timba) au Mandé.

Un groupe de Kamara a suivi Suleymane Konaté, mais à cause de diverses contestations existant entre les Konaté et les Kamara, ces derniers voulurent éviter les risques de proximité et se tinrent à distance ; dolo, devise des Dogon de la région de Sanga, signifierait « rester à l’écart » en langue ancienne malinké. Au départ, les Konaté avaient pour interdit (tana) la panthère et les Kamara le varan ; il y eut dispersion tout au long du chemin.

Les Tellem, qui ont occupé les falaises avant l’arrivée des Dogon, seraient constitués de groupe émanant de diverses ethnies (dont des Kourouma du Mandé, des Katlé et Ganamé Soninké, etc.). Ils s’y étaient réfugiés pour fuir les guerres et l’esclavage. Les Mossi actuels descendent en partie de Traoré ayant quitté le Mandé avant l’époque de Soundiata. Il y eut, là aussi, plusieurs vagues de migrations.

Un texte traditionnel en langue malinké qu’il conviendra d’enregistrer, de traduire et de commenter, énumère plus de trois mille noms de clans et de familles, ainsi que l’histoire de leurs implantations géographiques, par régions et par villages, en Afrique Occidentale.

L’histoire africaine est reconstituée à partir de la tradition orale. Or, il existe plusieurs versions pour chaque récit. En absence de preuves de supériorité, aucune version ne peut dominer sur l’autre. Echangeons donc de versions pour enrichir notre histoire et connaitre la différence de version pour notre propre analyse. Evitons donc de mépriser la version de l’autre.

 

Youba Bathily est auteur de plusieurs livres. Il est historien et sociologue malien

Ses livres sont achetables sur OrangeMoyen à 6000F en contactant le 76076558

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